La bête sauvage du capital, même la Chine ne croit plus en l’occident par danielle Bleitrach

Si l’on,veut mesurer le degré atteint par la bête sauvage (Hegel decrit ainsi la société civile) des  intérêts privés, il faut lire les analystes boursiers. Il y a chez les traders un côté galopin méchant s’excitant sur des jeux virtuels. En rupture totale avec les conséquences réélles de leurs jeux, ce n’est même plus l’appat du gain. Le meilleur dans le style docteur folamour de l’économie financière est  Philippe Béchard je vous conseille ses deux dernières chroniques (1). Ce type est soit un moraliste, soit un anarchiste, un membre de la bande à Bonnot ayant échappé aux brigades du tigre.  Philippe Béchard nous décrit Wall street et les jeux financiers comme le naufrage du titanic où les passagers de première classe s’en mettraient plein la lampe jusqu’à en rouler sous la table ivres morts … Ca n’empêche pas le titanic de sombrer..

Prenons sa chronique du 25 février 2010 dans laquelle il nous décrit  « Big Ben » Bernanke, le patron de la FED, la banque centrale des Etats Unis « qui a vu le moral des troupes boursière décliner depuis un mois et les indices piquer du nez à la moindre mauvaise nouvelle. Il s’est donc empressé de remettre les pendules à l’heure (d’où ce surnom de « Big Ben », parce qu’avec lui, c’est toujours l’heure pour ses potes de Wall Street d’aller chercher du cash gratuit auprès de la Fed !) en réaffirmant que les taux resteront bas pour « une période de temps très étendue« .

« Pour bien illustrer son propos, il invoque des usines qui tournent au ralenti, une inflation maîtrisée. Il mentionne aussi une reprise fragile qui n’est pas encore autonome (« notoirement incapable de s’auto-entretenir », pour rester plus fidèle au texte original) et devra être soutenue par des moyens monétaires appropriés et une politique monétaire non restrictive. »

Oui vous avez bien lu, l’appel à la mangeoire repose sur le constat que l’économie est dans un tel état que l’on va devoir laisser l’argent abondant et à taux d’intérêt nul (pas pour les Etats qui eux empruntent à un taux plus lourd)… Et le fait que le FMI lève le tabou ultime, celui sur lequel nous vivons depuis des décennies, à savoir la nécessité de juguler l’inflation va dans le même sens: la situation est telle qu’il faut détruire y compris les ultimes principes du « enrichissez-vous » les croyances supertitieuses  du marché néo-libéral…

« A ce petit jeu, on peut se demander combien de temps l’Oncle Sam pourra tenir, avec sa douzaine d’Etats en faillite et pratiquement le double en fâcheuse posture budgétaire ! Wall Street a encore un peu de temps pour y réfléchir, mais certainement pas de longs trimestres de neutralité fiscale pour encaisser des dividendes en toute quiétude. »
 

La Chine est écoeurée…

Notre analyste poursuit sa description du naufrage final en contemplant la décision chinoise, celle-ci, nous l’avons vu, a commencé à vendre une partie de ses dollars (rachetés on s’en souvient par les pauvres japonais qui sont déjà étouffés par le poids de ce papier monnaie douteux), la Chine ne croit plus que l’on puisse sauver le titanic du naufrage, elle commence à tourner le volant sur le marché intérieur. Et quand le quart de l’humanité amorce un mouvement de retrait le moindre battement d’aile de papillon prend des allures de tsunami. Jusqu’à ce jour la Chine a empêché la débâcle totale, son repliement est un signe . Mais revenons en à notre analyste toujours en proie à une allégresse morbide  d’amateurs de jeu video entrain de tuer les uns après les autres tous les gardiens du sanctuaire capitaliste, il  exulte  » depuis lundi matin, nous focalisons notre attention sur la Chine et la Bourse de Shanghai en particulier. Elle vient de signer deux séances de repli après une semaine complète de congé… et le cadeau de bonne année de Pékin, c’est une réappréciation symbolique — mais bien réelle — du yuan par rapport aux devises occidentales.
 
Les compteurs étaient bloqués depuis le milieu de l’été 2008 — en fait, très précisément depuis que le pétrole avait inscrit un record historique à 148 $ le baril sur le NYMEX : le dollar était alors tombé bien bas ! Il a commencé à se redresser le lendemain même de la décision de geler la parité du yuan par rapport au billet vert, lequel venait d’inscrire le 15 juillet 2008 son plancher historique par rapport à l’euro vers 1,6050.
 
Le message était clair : priorité aux exportations, et tant pis pour l’inflation ! C’est une variable facile à maîtriser : le prix des carburants et de nombreux matériaux de base était fixé administrativement par le gouvernement chinois, soucieux d’éviter une valse des étiquettes avant l’ouverture des Jeux olympiques programmés quelques semaines plus tard.
 
Le renchérissement du yuan — même si pour l’heure, répétons-le, il ne s’agit que de variations symboliques — pourrait avoir comme effet de limiter à terme la hausse des prix importés, l’essentiel de la facture étant représenté par le pétrole.

L’autre interprétation possible, c’est que la Chine mise effectivement tout sur son marché intérieur. Elle partirait du constat que le rebond de la croissance aux Etats-Unis et en Europe n’est qu’une fraude statistique et que la consommation des ménages occidentaux va inexorablement se dégrader au cours des prochains mois et des prochaines années, sous l’effet conjugué de la hausse du chômage et de l’alourdissement de la facture fiscale. Ce serait à l’image de ce qui se met déjà en place en Grèce, au Portugal et en Espagne… et qui a déjà été imposé aux pauvres citoyens irlandais dès l’entame de l’année 2009. »

Et il n’y a pas  que les Etats-Unis…
 
Notre amateur de naufrage poursuit : « Les pays du « Club Méditerranée » ont simplement bénéficié d’un an de grâce en matière de taxes et d’impôts. La France et l’Angleterre préserveront le statu quo jusqu’au début de l’été… mais dès que les échéances électorales seront passées (en avril pour les régionales dans l’Hexagone, le 3 juin prochain pour les législatives outre-Manche), il va falloir que les contribuables préparent leur carnet de chèques. »
La conclusion aux boursicoteurs est claire « Toute embellie ponctuelle constitue donc une bonne opportunité pour s’alléger, surtout lorsque les nouvelles — comme ce fut le cas mardi — ne sont pas bonnes ! » Vendez, vendez, c’est la débâcle… Un tel conseil étant bien sûr à grande échelle le moyen d’enclencher la vague du tsunami…

Pendant ce temps, d’autres analystes, je pense à Paul Jorion incontestablement parmi les plus lucides proposent des régulations, un nouveau rôle pour la BCE, les moyens de limiter la spéculation, cette folie anarchisante du capital, mais il est bien tard….

Est-ce que nous ne sommes pas tous dans cet état de lévitation, faisant comme si tout fonctionnait encore alors que les signes se multiplient de l’impossibilité de continuer ?
 

(1) Philippe Béchade rédige depuis dix ans des chroniques macroéconomiques quotidiennes ainsi que de nombreux essais financiers. Intervenant quotidien sur BFM depuis mai 1995, il est aussi la ‘voix’ de l’actualité boursière internationale sur RFI depuis juin 2002. Analyste technique et arbitragiste de formation, il fut en France l’un des tout premiers ‘traders’ mais également formateur de spécialistes des marchés à terme. Rédacteur aux Publications Agora, vous trouvez chaque jour ses analyses impertinentes des marchés dans La Chronique Agora.

2 commentaires

  1. Oui! il est urgent d’en finir avec l’Empire Anglo-étasunien. Il est évident, qu’en définitive, c’est tout l’Occident qui est en cause et va devoir s’habitué à être comme les autres pas moins mais surtout pas plus! La monnaie doit être un moyen d’échange et pas un outil d’opression dans les mains d’une poignée de voyous.
    M.R

  2. Anglo-étasuien pas seulement… Les lobbys ne se préoccupent guère des pays et leurs frontières. Les « multi-nationales » non plus. Il suffit d’examiner l’affaire Clearstream pour se rendre compte de la puissance des cartels bancaires, avec leurs lois …
    La France résistera peut-être un peu plus que d’autres au tsunami économique qui menace car elle dispose de mastodontes parmi les entreprises du CAC40 dans différents secteurs stratégiques (gestion de l’eau, environnement, énergie, automobile, luxe, grande distribution, pétrole, banque-assurance … entre autres) mais on voit bien que des pays comme l’Espagne ne tiennent plus qu’à un fil : A part le tourisme et les serres d’Alméria cultivées par les travailleurs immigrés sur-exploités, ce pays n’a reposé que sur l’illusion de l’immobilier. Et aujourd’hui on voit la réalité : 25% de chômage.

    Bon article, mais je trouve que la conclusion bien « molle » en comparaison de ce qui nous attend : Effectivement de nombreuses villes et états américains sont en faillite. Mais de nombreuses municipalités en France sont également largement dans le rouge, sans parler de l’Etat.
    La dette cumulée devient si délirante pour certains pays, tout comme les taux d’intérêts des prêts qui leurs sont généreusement consentis, que seules des mesures drastiques pour la rembourser, ou au moins de faire encore un peu semblant de vouloir le faire, semblent pouvoir s’appliquer, au prix évidemment d’une colère sociale qu’il faudra réprimer.
    Voilà où on en est…
    Vouloir « limiter » la spéculation est une absurdité puisque la spéculation est l’essence même de l’économie de marché dématérialisée à laquelle nous sommes soumis.
    En revanche, Effectivement la Chine ne croit plus dans l’occident et en a de moins en moins besoin (à part pour ne refourguer sa camelote à bas coûts bien sûr) pour plusieurs raisons autres que celles liées à cette fausse monnaie qu’est le dollar :
    – Ils ont maîtrisé leur population (dans tous les sens du terme et particulièrement en terme de démographie). Ils ont donc un marché intérieur colossal à développer
    – Ils ont acquis les technologies auprès des grandes entreprises européennes notamment par des transferts de technologie (au lieu d’acheter uniquement le produit, ils ont acheté l’usine qui les fabrique et maintenant développent leurs propres voitures, leurs avions, leurs navettes spaciales …)
    Par ailleurs vu qu’ils excluent les entreprises étrangères pour les réponses à appels d’offres publics, leur marché intérieur demeure difficile à pénétrer, tandis qu’ils peuvent eux investir massivement (en Afrique notamment depuis plusieurs déjà).

    Mais tout cela n’est pas très important en comparaison du réel problème qui nous guette : Les chinois (mais également la middle-class indienne, brésilienne, mexicaine … ) veulent vivre comment nous, ce qui est juste impossible sur une Terre déjà bien sale, et déjà très largement pillée pour ses ressources depuis 200 ans. Bien sûr on peut croire qu’on va faire de la « croissante verte » mais … il ne faut s’étonner que certains ricanent en entendant ces expressions d’écolo-collabos.


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