interview de Max-Jean Zins sur l’attentat en Inde

w300px_271108s-indiamumbaiMax-Jean Zins est chercheur au CERI (Centre d’études et de recherches internationales). Ce spécialiste de l’Asie a collaboré à l’ouvrage de Christophe Jaffrelot L’Inde contemporaine de 1950 à nos jours. Il revient pour LEXPRESS.fr sur le profil des auteurs de l’attaque terroriste de Bombay.
Que savez-vous des « Moudjahidine du Deccan » qui ont revendiqué les multiples attaques à Bombay?

Très peu de choses car c’est une organisation islamiste inconnue jusqu’alors. Par contre, la présence du mot « Deccan » m’interpelle: elle révèle que ce mouvement semble préoccupé par un problème politique interne à l’Inde. La préoccupation des terroristes n’a rien à voir avec le Cachemire [région dont l’Inde et le Pakistan se disputent la souveraineté, ndlr] Ce groupe reflète plutôt les craintes et les doutes de la communauté musulmane indienne.

Pouvez-vous en dire plus sur ces craintes que ressent la communauté musulmane indienne?

Depuis les années 70, la laïcité de l’Etat fédéral indien est remise en question. Le nationalisme hindou s’est développé, [comme le Bajrang Dal dans l’Etat de l’Uttar Pradesh, ndlr] et les attentats meurtriers contre la communauté musulmane, qui compte plus de 150 millions de personnes à travers le pays et se montre en général très pacifique, se sont multipliés sans que l’Etat n’arrête les responsables.

Cette attaque pose donc une vraie question: celle de l’intégration de la communauté musulmane à la société indienne. On ne peut pas parler de terrorisme musulman en Inde, ce mouvement n’existe pas, c’est vraiment un phénomène très récent. Mais je pense que ce groupe a su recruter des jeunes auprès desquels il a cristallisé les tensions, les frustrations et les discriminations accumulées par toute une communauté.

Le mode opératoire, la prise d’otages, est aussi quelque chose de nouveau en Inde?

Oui et c’est également la première fois qu’un attentat cible aussi spécifiquement les étrangers. Cette action rappelle des attaques comme celles qui ont eu lieu en Egypte. Il y a une volonté des « Moudjahidine du Deccan » de faire de la publicité, de se faire connaître du monde entier.

Doit-on craindre de nouvelles attaques?

De telles actions peuvent se reproduirent, il suffit d’une dizaine de personnes armées de mitraillettes ou d’armes lourdes pour prendre d’assaut un bâtiment. Cependant, la police et l’armée vont redoubler de vigilance et vont infiltrer les groupes armés pour prévenir de nouveaux attentats. On peut davantage craindre des représailles de la part de milices hindous ou des maoïstes.

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