Avec leur mur, ils veulent étouffer notre mémoire sous des gravats! par Danielle Bleitrach

berlin[1]world-company.1255761758[1]Qui contrôle le passé contrôle le futur: qui contrôle le présent contrôle le passé… Voici le cercle vicieux médiatique de toutes les reconstitutions historiques d’un passé proche et même parfois lointain…

Il s’agit de rejouer inlassablement la chute du communisme, lui inventer un passé qui n’est pas le sien, forcer le trait jusqu’à créer l’identité avec le nazisme pour mieux faire croire qu’il n’y a pas d’alternative. Un « no future! » en particulier pour la jeunesse pour qui cette histoire appartient au même flou que la guerre de 14-18… Le tamtam médiatique se déchaîne, nous assourdit, l’Europe est née, la chute du mur a rompu la digue qui séparait les Européens…

Oui mais voilà le coeur des médias n’y peut rien, le fait est que l’occident impérialiste ne contrôle déjà plus  le présent, les vainqueurs de la guerre froide sont perdus, ils n’ont pas d’autres solutions que d’effrayer la jeunesse avec le croquemitaine communiste. Ils n’ont plus une seule idée, une seule perspective. Les vainqueurs de la guerre froide ne sont que d’effrayantes momies. Regardez cette photo de Bush père, de Reagan et de Gorbatchev le dupe satisfait… Ne sont-ils pas assez parlants? Alors ajoutez-y la photo de camp David où Clinton oblige Arafat à approuver les accords d’Oslo, la moins mauvaise chose qui pouvait advenir après la chute du mur de Berlin et les nouveaux rapports de forces. Le tiers monde, les mouvements de libération nationaux comme la classe ouvrière  des pays capitalistes  ont tous beaucoup perdu mais il a fallu danser sur l’air des vainqueurs.

Mais il existe une autre photo, parce que ce samedi 7 novembre il devrait se fêter le 92 e anniversaire de l’arrivée au pouvoir de l’Etat russe du parti bolchevique dirigé par Vladimir illitch Lenine qui malgré la faiblesse de son parti a réussi grâce à sa stratégie révolutionnaire à renverser le tsar et son Etat autoritaire quasi féodal qui avait engouffré le pays dans les horreurs de la première guerre mondiale. Quand ce jour là les drapeaux rouges ont flotté sur les donjons du kremlin comme plus tard ils flotteront sur Berlin, commençait une nouvelle ère qui ne s’est pas interrompue, quoiqu’on en dise, avec la chute du mur de Berlin. Le triomphe bolchevique eut la même résonnance que la Révolution française en son temps et chacun envisagea une autre réalité possible, certes il y eut beaucoup d’utopies , beaucoup de déceptions mais encore aujourd’hui c’est de l’avenir qu’il est question…  Les pseudos vainqueurs de la guerre froide prétendent juger du socialisme non face aux crimes du capitalisme mais par rapport à l’espérance que  ce socialisme a fait naître  dans la conscience mondiale, y compris dans la classe ouvrière des pays capitalistes, chez les peuples du Tiers monde. Le socialisme reste ce qui doit advenir et qu’il faut présenter comme un gouffre pour que chacun reste frileusement dans sa prison, s’empêche même de penser. Le monde a véritablement changé de base et il en sera de 1917 comme de 1789, on ne pourra pas malgré toutes les contre-révolutions revenir en arrière. Cette révolution inaugurée le 7 novembre 1917 a accompli des exploits sans nombre dont le plus grand fut sans doute sa lutte héroïque contre l’Allemagne nazie. Et mur de Berlin pour mur de Berlin, je songe à cette image du soldat russe plantant un autre drapeau sur le Reichtag en ruine. Oui les communistes ont accompli une oeuvre gigantesque et à cause de cela même ils ne doivent pas craindre d’examiner leur passé, de critiquer leurs fautes, non avec les lunettes des vainqueurs de la Guerre froide mais pour mieux faire désormais.

Je me souviens de cet allemand de l’Est, ce luthérien foudroyé qui me disait « Sommes nous un peuple que l’on peut vendre ? »Gorbatchev les avait réellement vendus contre des espèces sonnantes et trébuchantes. Comment en est-on arrivé à une telle dégénérescence du pouvoir chez les communistes ? Il faut oser regarder une histoire dont nous n’avons pas à rougir mais qui a encore besoin d’être comprise, assimilée pour que s’ouvre une perspective.

 Leur propagande médiatique nous transforme tous  en éclopés de l’espérance, nous qui ont été vendus à Berlin, là où notre siècle saigne, enfin le siècle dernier. Parce que la chute du mur parut consacrer l’apparente victoire des libertaires sur l’ordre répressif communiste , en fait ce fut leur mort et le retour de tous les conservatismes. La défaite des communistes a été celle de toutes les espérances, du progrès social, mais aussi celle d’une culture qui aurait eu un sens, aurait participé à la création d’un citoyen… C’est le temps du divertissement, celui du vide que l’on comble par le consumérisme alors même que l’on nous fait oublier le nécessaire… Alors que le socialisme , en RDA en particulier ça a été un  élargissement encore inconnu y compris aujourd’hui, le droit au travail, le droit à la santé, au logement, à la culture, tout y était pris avec gravité y compris hélas les désaccords… Aujourd’hui dans la célébration de sa fin , il n’y a pas d’autre issue que de danser sur les airs abominables d’une musique de supermarché… Quand j’entends le mot culture je sors mon revolver, l’ignorance du passé fait partie du bagage du crétinisme de masse…

Ne sommes-nous pas dans le temps du dialogue entre deux marchands de saucisse dont parlait Heiner Muller, « l’un dit je mettrai plus de ketch up, l’autre répond « moi plus de moutarde mais ils nous vendent toujours la même saucisse. »

Qu’ils parlent de la deuxième guerre mondiale, de la chute du mur de Berlin ou de la crise, les marchands nous vendent toujours la même saucisse.

Oui mais voilà qu’avons nous à en dire nous ? Pas seulement de la nostalgie!!! Mais le fait que l’histoire de ce mur ne peut pas être isolée d’une autre qui fait que seul le communisme, seule l’Union Soviétique a été en capacité réelle d’abattre le nazisme… Et que la RDA est née de cette histoire là… Nous communistes sommes nés de cette fracture, nous avons été comme le socialisme enfantés dans la douleur, dans les chaînes du capitalisme, dans ses plus monstrueuses trouvailles y compris l’extermination industrielle de masse…

«La plus grande chute est celle qu’on fait du haut de l’innocence.»a dit heiner Muller. Notre chute fut pour beaucoup d’entre nous un gouffre que nous n’avions même pas soupçonné… Ils ont commencé à partir de là leur immonde travail sur la mémoire et il n’y eut pas de lieu où ce travail d’effacement fut accompli avec plus de zèle que dans l’ancienne RDA.

A propos de RDA, de l’effacement de la mémoire j’ai repensé à heiner Müller et j’ai tenté de voir ce que l’on disait de ce grand dramaturge sur le net. j’ai découvert que de stupides biographies en faisaient un anarchiste, un dissident, on lui reconnaissait tous les maîtres à penser sauf Ernst Bloch le théoricien marxiste. Seul Jean Jourdheuil  disait ma foi des choses fort sensées et l’a décrit comme « pas un dissident, non un communiste minoritaire« .

Voilà un problème déjà qui nous renseigne sur la dégénérescence, le système n’a pas autorisé le communiste minoritaire, il a cultivé les flagorneurs, les courtisans, pour mieux faire accepter les choix inacceptables et voici comment on en arrive à un Gorbatchev et à cette paillasse d’Elstin. C’est différent un « communiste minoritaire et un dissident: le dissident  avance apparement seul, en fait il a une horde de médias qui le filme, il est grassement financé par les maîtres du monde et pratique sa contestation professionnelle à la Bernard henri levy, l’homme au coeur éternellement en écharpe mais passé maître dans l’art des réseaux de pouvoir. Le communiste minoritaire lui est interdit par la presse bourgeoise et interdit par la presse communiste. Est-ce que le socialisme tolerera un jour les communistes minoritaires ? La preuve est faite par le PCF qu’on peut tout abandonner mais conserver ce refus de reconnaissance…

Pour revenir à Heiner Muller, disons qu’il est  un poète épique et que son écriture a besoin de se confronter à l’histoire, il est bien un enfant du communisme, de ce temps plein de gravité où tout n’était pas que divertissement mais engagement.

Né Allemand, comme le mur, avec dans les narines une odeur répugnante : « Enfant j’entendais les adultes dire : / Dans les camps de concentration avec les Juifs / On fait du savon. Depuis j’ai toujours eu de l’antipathie / Pour le savon et j’exècre l’odeur du savon. / Aujourd’hui je mets en scène TRISTAN et j’habite / Dans un appartement moderne de la ville de Bayreuth. L’appartement est propre comme je n’en ai jamais vus / Tout est à sa place : les couteaux Les cuillères Les fourchettes / Les casseroles Les poêles Les assiettes Les tasses Le lit double. / La douche MADE IN GERMANY réveillerait les morts / Aux murs du kitsch floral et alpin. / Ici l’ordre règne, même la verdure derrière la maison / Est en ordre, la rue silencieuse, en face la HYPOBANK / Quand j’ouvre la fenêtre pour la première fois : / l’odeur du savon. La maison le jardin la ville de Bayreuth sentent le savon. / Je sais à présent, dis-je face au silence,/ Ce que signifie habiter en enfer et / Ne pas être un mort ou un assassin. Ici/Naquit AUSCHWITZ dans l’odeur du savon. »

Sa pièce posthume portait un  sous-titre évocateur « Les spectres du Mort-homme » comme le spectre d’hamlet machine, sortir les morts du charnier, comprendre les tragédies historiques y compris celle de son camp.  Rarement Heiner Muller a parlé de lui mais il écrivait cette dernière pièce en se sachant condamné, il est mort à Berlin en décembre 1995. Il ne parle pas de lui, il se situe dans l’histoire, dans les mythes fondateurs de l’humanité et la question du socialisme est pour lui à ce niveau, la référence reste Ernst Bloch, celui dont personne ne parle non plus. Il appelle sur la scène des mythes comme Promethée allégorie de l’Allemagne qui n’a pas osé faire la Révolution et se l’est vu imposée comme un châtiment, mais aussi Médée, les personnages des liaisons dangereuses ou le libertinage dans un bunker de fin du monde. Il évoque  Hitler, Staline, Goebbels et Brecht. Et c’est justement au pied du mur que s’ouvre la pièce, la dernière. Postés comme simples soldats de faction, Thälmann et Ulbricht, deux figures historiques de l’ancienne R.D.A., devisent sur la fin de l’Allemagne socialiste, tandis que les balles sifflent et qu’au loin passe Rosa Luxembourg.
Dans un long monologue, Staline ivre interpelle Lénine : « Il n’y en a toujours qu’un seul qui meure/ Disais-tu quand on te demandait/ Tes cadavres. Les as-tu comptés./ Je suis ta mort, je ne puis plus les compter./ Parce qu’ils sont le sol que nous foulons/ Sur notre chemin vers ton avenir radieux./ L’humanité est un morne matériau./ Fourmis sous la botte » Puis c’est à Churchill de dire : « On exorcise le diable par le diable./ L’un brise la nuque de l’autre/ Brun contre rouge, rouge contre brun lave plus blanc/Le tapis de cadavres de trois continents/ Sur lequel vous dansez votre dernier tango/ Qui ne veut m’aimer, qu’il me craigne/ Chacun de nous danse sur son parquet/ Mon atout s’appelle Hitler, nécessité n’a pas de loi. »

Oui parce qu’il y a là un autre fait important que le système de propagande occulte, le mur n’a pas été créé parce qu’il fallait empêcher les Allemands de l’Est de rejoindre le paradis capitaliste ou cela n’était qu’accessoire mais parce qu’une guerre était menée contre le communisme et cette guerre avait des dimensions économiques.. Jamais le socialisme n’a été autre chose qu’assiégé dès le début de l’Union soviétique toutes les armées se sont reconvertis en soutien des blancs contre les rouges… Ils ont crié plutôt hitler que le front populaire et l’atout du capital face à la crise a bien été Hitler… Le capitalisme a bien fait un tapis de cadavres sur trois continent… Et il continue… Combien de morts africains pour sortir de la misère d’un continent dévasté? Combien de morts devant le mur mexicain… Les capitaux n’ont pas de frontières et les hommes meurent devant les murs, ce n’est pas le socialisme cela.

Mais revenons à heiner Muller et la RDA

Né à Eppendorf en Saxe le 29 janvier 1929.
Assiste à l’arrestation de son père par les nazis en 1933.
Enrôlé dans le Volksturm en 1944.
Rejoint la zone soviétique à la fin de la guerre et reprend ses études secondaires.
Ses parents passent en Allemagne Fédérale en 1951, il reste à Berlin-Est.
Se rapproche des cercles brechtiens, travaille pour l’hebdomadaire littéraire Sonntag et la revue de l’Union des Écrivains en 1961, année de la construction du mur de Berlin.
Suicide d’Inge MÜller, sa femme, en 1966.
Se détourne apparemment des sujets d’actualité pour s’orienter vers la tragédie grecque.
Dramaturge au Berliner Ensemble entre 1970 et 1976 puis à la Volksbühne dirigée par Benno Besson.
Le chanteur Wolf Bierman est déchu de la nationalité est-allemande en 1976, protestation de nombreux écrivains dont Heiner Müller. Les autorités de Berlin-Est favorisent un départ en masse d’écrivains en direction de l’Allemagne Fédérale : Heiner Müller reste en RDA.
Dans les années 60, Il est ostracisé, mis au ban de la République des Lettres.
Dans cette période il va écrire Philoctète, Horace, Mauser trois pièces qui demeureront longtemps interdites de représentation.
En 1972 Ruth Berghaus l’engage comme “dramaturge” au Berliner Ensemble où elle mettra en scène sa pièce Ciment. Mais son Macbeth déclenche une violente polémique : il est accusé de “décadence”, de “formalisme” et de “pessimisme historique”.
Après un séjour aux Etats-Unis — à l’université d’Austin au Texas — il écrira en 1976-77 Vie de Gundling Frédéric de Prusse Sommeil rêve cri de Lessing et Hamlet-machine (deux pièces qui demeureront longtemps interdites) et ensuite La Mission, Quartett, Rivage à l’abandon Matériau-Médée Paysage avec Argonautes etc….
Sa situation dans son propre pays ne changera qu’au milieu des années 80, lors de la période gorbatchevienne. Il est entretemps devenu célèbre à l’étranger. Hamlet-machine et Mauser ont été créés à Paris en janvier 1979 dans une mise en scène de Jean Jourdheuil et ses textes ont été publiés par les éditions de Minuit. Patrice Chéreau monte Quartett en 1985. Bob Wilson montera Hamlet-machine en 1986. H. Müller est élu membre de l’Académie des Arts de Berlin en 1984, il en deviendra le Président en 1990. Monte l’Hamlet de Shakespeare et son propre Hamlet Machine à l’automne 1989, pendant que s’effondre le mur de Berlin.  Il est invité à faire des mises en scène de ses pièces au Deutsches Theater. Il fait partie du Directoire du Berliner-Ensemble à partir de 1992.
Ses succès personnels adviennent sur un fond historique remarquable : chute du mur de Berlin, réunification allemande. Le « bloc de l’Est » s’est effondré, Heiner Müller devient une célébrité. C’est alors qu’est lancée contre lui une campagne où on l’accuse d’avoir collaboré avec la Stasi. Il était en train de répéter un spectacle composé de deux de ses textes Le Duel et Tracteur et du fragement de Brecht Fatzer . De nouveau, mais à l’Ouest cette fois, il se retrouve montré du doigt, ostracisé, mis au ban de la société. Parce que loin de jouer les dissidents, alors qu’il se sait condamné il tente de sauver la mémoire de la RDA. Alors on l’accuse d’avoir été un agent secret de la Stasi. Il rendra publics les documents de la Stasi le concernant et cette campagne qui se fondait sur des rumeurs et créait la rumeur s’arrêtera aussitôt. .
Nommé directeur du Berliner Ensemble en 1993.
Monte La Résistible Ascension d’Arturo Uide B. Brecht en 1995.
Meurt le 30 décembre 1995.

Aux côtés de Brecht, le maître dont il a du se désencombrer il appelle d’autres figures de l’échec allemand, toutes ces révolutions qui n’ont pas été menées et qui a fait que des poètes sont morts de cette incapacité -Hölderlin, Kleist, Kafka…- la culpabilité allemande qui a préféré le nazisme et dans le fond passe la figure de Rosa Luxembourg. Hamlet Machine c’est hamlet dans la révolte de Budapest ou l’incapacité du dramaturge à se situer dans le socialisme, à même tenter d’écrire un drame historique, pourtant il ne voudra jamais renoncer à trouver cette écriture qui ne sera plus mauvaise conscience, soumission et de ce fait situera l’art dans l’histoire de l’humanité, sera à la hauteur de l’utopie, de l’espérance comme le proclamait Ernst bloch.
 « La RDA est importante pour moi, du fait que toutes les lignes de démarcation du monde traversent ce pays. C’est là le véritable état du monde que le mur de Berlin rend très concret. En RDA, la pression de l’expérience est bien plus forte qu’ici à l’Ouest, et cela m’intéresse d’un point de vue professionnel : la pression de l’expérience comme préalable à l’écriture. la vie compte plus d’obligations à l’Est du mur et cela vous oblige à penser plus radicalement, à formuler jusqu’au bout des choses sur lesquelles ici on peut passer encore avec légèreté. »

Je l’avais rencontré à Marseille à la veille de sa mort, il était narquois, distant et il avait jeté « me dire à moi que la RDA n’a pas existé c’est expliquer à proust que l’homosexualité n’existe pas« .

« Pour mon oeuvre littéraire, la vie en RDA était quelque chose comme l’expérience que Goya a faite du tiraillement entre sa sympathie pour les idées de la Révolution française et la terreur de l’armée d’occupation napoléonienne (…) ; la surdité était son arme pour se défendre de la terrible prise de conscience, puisque l’oeil du peintre lui interdisait la cécité. »
Müller a déçu l’occident parce qu’il n’était pas un dissident mais un communiste minoritaire et que pour lui la vie et son art n’avait de sens que tant qu’existait la RDA. Tout n’était pas possible et pourtant il fallait agir, quel était le rôle d’un artiste ? Müller aimait l’histoire de la visite de Brecht à l’université de Leipzig : interrogé par les étudiants sur ses intentions, maintenant qu’il était rentré d’exil et qu’il avait rejoint le camp socialiste, Brecht répondit à son auditoire ébahi que le théâtre devait se consacrer  » à la destruction de toute idéologie  » et  » à la production scientifique de scandales « .

Jean Jourdheuil expliquait  » On lui a mis cette étiquette d’homme de l’Est au moment où il a pris la défense des institutions de la RDA, après la chute du Mur en 1989. A cette époque, il avait retrouvé sa place dans la situation de l’Allemagne de l’Est: il avait été nommé metteur en scène du Deutsches Theater et était en pleine répétition d’Hamlet-machine au moment où le Mur est tombé. En 1987, il avait été intégré à l’Académie des arts, dont il devient président en 1989. A la chute du Mur, quand l’Ouest veut supprimer l’Académie des arts de l’Est et garder celle de l’Ouest, Müller s’y oppose. Il épure l’Académie des membres nommés grâce à leur appartenance au Parti, puis les deux institutions fusionnent. Enfin, alors qu’il était pressenti pour le Nobel, un jeune écrivain l’accuse d’avoir été un collaborateur de la Stasi. Deux mois plus tard, il se dédit mais le mal était fait. Une campagne avait été lancée pour déstabiliser un intellectuel et un artiste de l’Est qui pouvait être un emmerdeur. Il n’a pas eu le Nobel. Müller n’était pas un dissident, mais un communiste minoritaire. Ce n’était pas compris à l’Ouest. »

Voilà pour moi Heiner Müller est l’histoire de ce mur, celui qui ne laissait pas oublier l’importance des enjeux, où se jouait la vie des hommes mais que l’on ne nous raconte pas d’histoire il y a beaucoup plus de morts le long de cet autre mur qui sépare les Etats-Unis du Mexique, le sous développement de ses exploiteurs… L’histoire était tragique mais elle avait une mémoire celle de savoir ce qui se passe après que le soldat russe ait planté le drapeau rouge sur les ruines de l’Allemagne nazie, que fallait-il faire d’un monde qui naissait avec des hommes et des femmes issues de cette histoire là?  Celle que des crétins vont jusqu’à occulter ou prétendre occulter sous le prétexte de soutenir les Palestiniens qui ont été pourtant obligé d’accepter la loi des vainqueurs à la chute du mur… Comme dans d’autres peuples, aujourd’hui ils relèvent la tête, il est temps de retrouver l’Histoire, celle que les médias ne raconteront jamais, celle d’un écrivain qui était déchiré par elle et qui n’avait que trop conscience des limites du socialisme réel mais aussi du fait qu’il est espérance, qu’il combat la monstruosité et qu’il offre au peuple l’occasion d’agir, de penser, de croire en un futur malgré toutes les tares qu’il a eu et celles que l’on peut lui attribuer. La conscience parfois tragique qu’il faut en passer par là, ce temps obscur du socialisme… Quitte à retrécir pour pouvoir partir à l’assaut de l’infiniment petit comme un ciel étoilé… Lorsqu’on refuse de perdre la mémoire…

Danielle Bleitrach

12 commentaires

  1. Merci Danielle pour cet excellent article.
    Pour mettre les mots si justement, si élevés…
    Des mots qui font exploser cette cage de mensonges dans laquelle on cadenasse l’histoire pour boucler l’à venir.

  2. merci danielle, et si content de te lire…

    il me semble que la pression incroyable qu’ils nous mettent depuis quelques jours a un effet indigeste… c’est trop et conduit des communistes à prendre conscience qu’on ne peut s’en sortir sans sortir en même temps du discours mou de gauche sur le socialisme.

    leur célébration sans vergogne de la victoire du marché n’a-t-il pas comme effet de désamorcer cette idéologie de l’horrible socialisme réel… car tout le monde sait que le merveilleux capitalisme enfin offert aux allemands de l’Est en 89 est un criminel porteur de crise, de misère et de violence…

    pam

  3. Cela me fait tout drôle d’écrire ici.
    Le silence fut proportionnel à la souffrance…
    Content de te relire Danielle.

    Depuis longtemps, je l’ai compris, avancer tout drapeau déployé ne sert à rien, sinon à prendre des coups.

    Nous sommes retranchés dans nos archipels,géographiques, sociologiques,psychologiques et intellectuels.

    Nous avons commencé (pour certains bien avant) une longue marche il y a vingt ans.
    Nul ne sait encore, où cela nous mènera, ni quand nous arriverons… C’est très dur mais il faut s’y faire et surtout ne rien lacher sur l’objectif. Les deux pieds sur la terre et le regard fixé sur l’horizon.

    Je n’éprouve que fierté pour ces pays et de ces peuples dont on a rabaissé et dénigré un demi siècle d’histoire, un peu de notre histoire au fond. (merci Alain pour ton récit sur la RDA)

    C’est agréable de pouvoir régulièrement s’abreuver de visions et de récis non inspiré de l’idéologie dominante. Et ne rien oublier de nos fondamentaux.

    PAIX
    EDUCTATION
    SANTE
    JUSTICE SOCIALE

    BONNE SOIREE

  4. Ce que Fidel disait sur le mur :

    « L’Empire a besoin de Latinos, d’émigrants, et ceux-ci, pour tenter d’échapper à la faim, franchissent la frontière mexicaine. Plus de cinq cents meurent chaque année en tentant de franchir la frontière, autrement dit bien plus en douze mois que ceux qui sont morts en vingt-huit ans au fameux mur de Berlin.

    L’Empire parlait tous les jours du mur de Berlin. Mais pas un mot de celui qui se dresse entre le Mexique et les USA, où plus de cinq cents personnes meurent tous les ans en tentant de le franchir pour échapper à la pauvreté et au sous-développement. Voilà le monde où nous vivons.»

    Discours pour soixantième anniversaire de son entrée à l’université
    17 novembre 2005

  5. y a henri alleg sur la 3 ! c’est trop rare pour ne pas le signaler !

  6. ça fait plaisir de vous retrouver tous, je suis épuisée, j’ai passé la journée à préparer un partiel pour jeudi sur la géographie de la Chine,J’ai les murs de la maison couverts de grandes feuilles de papier sur lesquels sont énumérés, décrits les montagnes, les plateaux, les plaines et les déserts dans chaque province , j’ai la tête qui éclate mais ça fixe un peu mieux les idées. Je suis contente parce que pour le moment ce sont les amis, ceux qui sont de multiple façon des « communistes minoritaires » qui sont là chacun avec ses choix n’est ce pas Marc ou Dimitri… Tant que j’aurais l’impression d’être dans ce cocon amical je pourrai de temps en temps écrire des textes, d’autres comme Alain Girard mais aussi marc harpon, Alain Rondeau se considèrent comme des rédacteurs, c’est trés vivable comme ça… J’attends des traductions de Marianne, Julien… C’est vrai Pam qu’ils en font trop, ils écoeurent certes mais cela décourage aussi, individualise et ça ce n’est pas bon. Oui Dimitri, il y a eu de la souffrance et j’ose dire une souffrance imméritée venue des miens, incompréhensible, encore aujourd’hui j’ai peur, je vois avec inquiétude monter la courbe des lecteurs, hier on atteignait les 1600 visiteurs alors je m’inquiète, je en veux pas que mes textes souient repris ailleurs, que l’on parle encore de moi et que l’on me traite mal… je me demande si je n’ai pas tort de pointer mon nez hors de ma retraite… J’ai un peu fait le tour du net j’ai trouvé quelques (rares) sites intelligents, humains, mais en général ils n’offraient pas des possibilités de dialogue… Que faire, que va-t-il me tomber dessus?

    Danielle Bleitrach

    • bonjour

      bien sur les coups bas vont arriver, les posts anonymes, les cancrelats rouges et bruns, les bruns,mais l4essentiel est de tenir quelques articles de fond comme tu le fais Danielle, tes analyses personnelles sont précieuses, pour l garniture nous pouvons assurer, entre Marc, Marianne et les autres.
      la meilleure chose à faire, ç mon sens, est de tailler sa route sans tenir compte des boeufs sur le bas côté, qu’ils meuglent et remuent la queue, les mouches y survivront quand même.
      La fréquentation du site a doublé,plus ça montera plus ils tireront à vue, ils sont dans une logique commerciale, audimatesque et grand bien leur fasse;
      comme dit Dimitri, ne rien lâcher sur l’objectif.

      Que tex textes soient repris ailleurs là c’est possible de l’empêcher, franchement cela serait dommage et tu sais que l’important est de mener cette guerre idéologique, de permettre de faire enfin 3 pas en avant quand nous n’avons cessé d’en faire des centaines en arrière.
      Je lisais que 100 000 personnes avaient assisté à la partie politique de l’Otan hier à Berlin.3 millions et demi d’habitants pour la seule ville,tous les médias du monde mobilisés, un fric fou parti en dominos, un peu le jeu des pyramides, tu investis et tu toucheras mille fois le pot, enfin il semble que la douche ait été gratuite c’est déjà cela.
      Donc 100 000 selon leurs médias, je gage que leur police va annoncer 30 millions, c’est un flop, c’est 6 fois moins que la fête de l’Huma;
      U2 vénérable grope milliardaire et plein de bons sentiments mais pingre sur le chéquier a rassemblé 10 000 personnes pour son concert gratuit à la même occasion. Le groupe le plus vendeur de la planète après Michael, qui se prend un concert à 10 000 , lui qui remplit des stades en payant.
      Il semble bien que la mayonnaise ne prenne plus trop et cette persistance à vouloir enterrer le socialisme et donc à se rassurer, est de bon aloi.
      Je pense à ces allemands qui voudraient reconstruire le mur, entre 12 et 17%, je n’ose imaginer ce que fut la violence des vainqueurs sur ce peuple est allemand pour que renaisse ce besoin de protection guidé là, par par un gouvernement, un parti, mais par des femmes et des hommes meurtris, salis, méprisés.
      Hier l’Otan a rassemblé des chefs de hordes à Berlin, Dieu Obama est intervenu par voix céleste, l’art de la propagande retrouvait tout son faste, les chemises brunes peuvent défiler sous la porte de Brandebourg, les enfants tomber sous les balles à Gaza, Kaboul,l’ordre nouveau règne pour mille an, mais les peuples n’ont pas dit leur dernier mot, pas encore.

  7. Tu sais bien que ce ne sont pas seulement les rouges bruns, mais bien les miens ou ceux que je croyais les miens….Et ça je n’arrive pas à me blinder porter et recevoir des coups de l’ennemi c’est bien. En recevoir jusqu’à plus soif sans l’avoir mérité de ceux aux côtés desquels on combat c’est terrible et c’est alors que la médiocrité, la méchanceté gratuite d’un individu vil, d’une femme jalouse vous blesse pas parce que c’est important mais pazrce que ce sont les votres qui vous ont écorchée vive. Mon mari avait été torturé par la gestapo, il me disait quelques règles: tu dois tenter de résister 24 heures, le temps que les camarades se planquent, changent le réseau, que tu ne puisses plus vendre personne… Parce que le plus difficile c’est de tenir le deuxième jour où ils te « travaillent », tu es à vif, le moindre effleurement te fait hurler… Mais les camarades doivent le savoir et se planquer tout de suite parce que personne ne peut en vouloir à cdelui qui parle le deuxième jour…
    Fidel a dit « toute la gloire du monde tient dans un grainde maïs »il citait Marti. Rien je dis bien rien ne vaut les dix ans où j’ai été « travaillée », désormais c’est comme ça je ne veux plus de tout ça. Ecrire me détend des révisions lourdes… Mais je ne souhaite en aucun cas être à nouveau « travaillée », c’est comme ça…
    Cela dit c’est vous qui m’obligez parce que vous faites plus qu’apporter la garniture et tu le sais bien, et je me dis que vous aussi vous prenez des coups et que vous êtes là avec votre honneteté de communiste… Pas pour briller, pas pour l’audimat, avec sincérité, vous n’avez rien à vendre, rien à proclamer de vous même, vous êtes les communistes…
    Danielle Bleitrach

  8. Danielle, tu peux obliger les lecteurs à rentrer un mot de passe pour entrer sur le site. C’est assez simple je crois (surtout pour Alain).
    Tu le donnerais à ceux que tu estimes dignes de confiance et ceux-ci pourraient éventuellement proposer des personnes cooptées que tu accepterais ou non.

    Je ne suis pas sur que ce soit vraiment utile mais si ça peut te protéger.

  9. Philippe
    dans mon entreprise le service informatique considère que l’essentiel des risques provient des manipulations hasardeuses de ton serviteur, je suis malheureusement obligé de reconnaitre que cette analyse est fondée.
    Par contre que quelqu’un se charge de faire le tri des posts, qu’il les enregistre au cas où serait du domaine de l’utile.
    Je connais un élu UMP d’une ville qui est la mienne qui s’est pris pour plus de 30 000 euros d’amendes pour diffamations et autres c’est dire que le réveil pour certains peut être comateux.

    voila

  10. Ce que j’aimerais c’est qu’il y ait effectivement un système qui puisse bannir les facheux et limiter le cercle aux « habitués », ensuite que les articles (ern particulier les miens, je ne peux pas me prononcer pour les autres) ne puissent être pris en copié collé et même pas des liens… Ensuite que vous agissiez un peu tous comme Alain que vous vous refendiez d’une texte ou d’une traduction, une par semaine serait suffisant si nous sommes assez nombreux.
    Danielle Bleitrach

  11. Concernant la copie d’article rien ne peut empêcher, freiner si, il est souhaitable qu’apparaisse sous chaque texte la mention refusant le droit de reproduction ou obligation de mentionner l’origine, ensuite en cas de non respect c’est la case tribunal, en principe un simple rappel en cas de désaccord suffit à mettre un terme à la copie. Il y a eu déjà le problème ici avec Dedefensa qui voulait assassiner Danielle qui ne savait pas mettre les liens, comme quoi la vie ne tient qu’à un fil parfois.
    la possibilité de commenter peut être limitée.
    Le plus efficace serait que quelqu’un prenne en charge cette question en sachant que généralement les bons articles sont reproduits et c’est un peu légitime que tes articles se baladent…
    d’ailleurs j’en ai repris un hier sur le mur, datant de l’année dernière.
    Je crois que l’essentiel est Changement de Société, si il parvient à redémarrer dans de bonnes conditions, le reste, il y a du monde pour prévenir de toutes manipulations ou autres saloperies que l’on découvrait moins rapidement ou jamais du temps du papier journal.
    Faisons vivre ce blog si nous le pouvons, alimentons d’autres si besoins et assoiffons l’ennemi.


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